Pourquoi Ibn Taymiyya a-t-il été emprisonné ?

Allah عز وجل a décrété que les bons réformateurs  المُصْلِحُون subiront beaucoup d’hostilité, de disputes et même de la violence psychologique et physique. (Cela n’est pas étonnant) quand on sait ce que les Prophètes عليهم السلام  eux-mêmes ont subi de la part de leur peuple seulement parce qu’ils venaient avec ce qui contredisait l’héritage de leurs pères. 

Les Prophètes عليهم السلام voulaient les conduire au chemin qui mène à Allah تعالى mais ils se révoltèrent contre eux et s’accrochèrent à l’égarement de leurs pères en disant :

« …Nous avons trouvé nos ancêtres sur une religion أُمَّة , et nous nous guidons sur leurs traces » (43 L’ornement: 22). Ces gens étaient hostiles envers les Prophètes عليهم السلام, certains ont d’ailleurs été expulsés et d’autres tués. Allah تعالى dit: « …Est-ce qu’à chaque fois qu’un Messager vous apportait des vérités contraires à vos souhaits, vous vous enfliez d’orgueil ? Vous traitiez les uns d’imposteurs et vous tuiez les autres. » ( 2 La vache: 87 ).

Ensuite les bons réformateurs ont suivi les traces des Prophètes عليهم السلام et il n’y a pas de réformateur (qui suit le droit chemin) qui n’ait subi du mal et de l’hostilité. Nous en avons d’ailleurs des centaines d’exemples dans l’histoire islamique et parmi les plus éminents, il y a le cheikh de l’islam Ibn Taymiyya رحمه الله .

Le cheikh de l’islam est apparu dans une période où foisonnaient les idées fausses et les concepts erronés sur Allah عز وجل et Son Messager ﷺ  et sur diverses lois de l’islam…Ibn Taymiyya رحمه الله est venu pour lever l’étendard de la vérité, appeler à revenir au Livre et à la Sounna et s’attacher à la compréhension des pieux prédécesseurs de la Communauté سلف الأمة. Il n’est pas le premier, ni le dernier, à avoir porté ce drapeau mais il a surpassé les autres dans ce rôle.

Il a démontré la fausseté des erreurs en cours à son époque. C’est ainsi qu’il a, par exemple, réfuté le panthéisme الحلولية , les faussetés du soufisme et le culte des tombeaux  il a montré la contradiction du Kullâbisme الكُلَّايِيَّة et de l’Ash’arisme الأشْعَرية , il a également réfuté al-Murji’ah المرجئة, les khawârij الخوارج, al-Jahmiya  الجَهْمِيَة, al-Mu’tazila  المُعْتَزِلَة, al-Bâtiniya الباطنية et a-Râfida الرافضة (ou chiisme duodécimain)

( NdT: Pour un aperçu très intéressant (et en français) sur ces groupes, voir les livrets «Précis sur les factions égarées » du cheikh Al-Fawzan : ICI et « Qui sont les chiites duodécimains ? » : ICI . En ce qui concerne le chiisme duodécimain الشيعة الإثني عشرية (nommé aussi imâmisme الإمامية ), il faut savoir que c’est la plus importante branche du chiisme. Plus des trois quarts des chiites en font partie et c’est d’ailleurs la religion officielle de l’Iran.)

En plus de tout cela, Ibn Taymiyya رحمه الله a établi la vraie croyance  الحقيدة الحقة, tirée du Coran et de la Sounna, en appelant à une bonne compréhension de ceux-ci. Il rejetait l’imitation blâmable et incitait à se servir de la raison. Il a abaissé les drapeaux de la superstition et démoli les piliers de l’égarement, il est donc normal qu’il ait eu de nombreux adversaires voulant faire disparaître l’étendard qu’il avait hissé. 

Les ennemis d’Ibn Taymiyya رحمه الله se renouvellent en même temps que se renouvellent  sa mémoire, ses livres et sa science. Les adversaires d’aujourd’hui ne sont pas moins nombreux ni moins féroces que ceux d’hier mais la rivalité est passée des livres aux écrans de télévision et des discussions dans les assemblées aux débats publics sur internet. Le cheikh de l’islam رحمهالله a été accusé de nombreuses choses, tantôt en falsifiant ses propos et tantôt en tissant des mensonges sur lui. Le cercle des controverses avec les adeptes du soufisme, d’al-Bâtiniya, de l’Ash’arisme et de al-Jahmiya s’est élargi et englobe, aujourd’hui, des extrémistes, des laïcs, des modernistes et quelques rédacteurs de journaux, de magazines et sur internet.

Les attaques contre Ibn Taymiyya رحمهالله ne peuvent être comprises que comme étant une des façons de nuire à l’islam authentique, rien de plus…le calomnier n’est rien d’autre qu’une tentative de diffamer la vraie croyance الحقيدة الحقة : la croyance des gens de la Sounna et du Groupe أهلا لسنة والجماعة. Accuser Ibn Taymiyya de takfîr التكفير (c’est-à-dire accuser les autres d’incroyance) et de rigorisme التشدُّد facilite, en fait, l’accusation de tous ceux qui sont venus après lui parmi ceux qui le respectent ou suivent ses décisions qui sont dans leur ensemble les décisions des pieux prédécesseurs السلف. Il suffit alors de dire (pour les dénigrer) : « Ils font partie des partisans de l’extrémiste Ibn Taymiyya ! » 

Lorsqu’il atteignit l’âge de 32 ans, après son retour du Pèlerinage, il commença à être exposé aux épreuves de l’arrestation, aux cachots des prisons et à l’assignation à résidence. Durant 34 années, à partir de l’an 693 de l’Hégire jusqu’à sa mort dans la prison de la citadelle de Damas qui eût lieu le 20/11/728 H, il fut emprisonné 7 fois. Quatre fois en Egypte (au Caire et à Alexandrie) et trois fois à Damas. En tout, il a passé environ 5 années en prison.

Pourquoi Ibn Taymiyya رحمه الله a-t-il été emprisonné ? Était-il un takfiri, qui accusait les musulmans et ses adversaires d’incroyance, ce qui a conduit les savants de son temps à le condamner à la prison ? Ou donnait-il des fatwas autorisant à tuer les musulmans ce qui a conduit le dirigeant à l’en empêcher ? Ou est-ce parque certains détestent l’étendard de la vérité, sont aveuglés par la lumière du droit chemin الهدى et veulent éteindre cette lumière ?! Pour répondre à ces questions, il suffit de connaître les causes des emprisonnements du cheikh de l’islam et d’en tirer les leçons qui s’imposent.

Cette année-là, un chrétien nommé ‘Assâf insulta le Prophète ﷺ puis se réfugia chez des ‘Alaouites qui le protégèrent. Ibn Taymiyya رحمه الله se mit donc en colère car on a porté atteinte à l’honneur du Prophète ﷺ, le responsable n’a pas été puni et de plus, il est protégé ! Il se concerta avec le cheikh Zayn ad-dîn al-Fâriquî puis ils s’adressèrent à l’adjoint du sultan ‘Az a-din al-Hamawî, à Damas, et lui expliquèrent la nécessité de préserver l’honneur du Prophète ﷺ et que celui qui lui a porté préjudice doit être puni.

Le représentant du sultan ordonna alors qu’Assâf soit amené. Ibn Taymiyya et al-Fâriquî, après avoir donné le bon conseil, sortirent de chez al-Hamawî. Lorsqu’Assâf et celui qui était avec lui (son protecteur) arrivèrent, des gens l’insultèrent et lui jetèrent des pierres, le chrétien fut donc blessé. Al-Hamawî fit alors revenir Ibn Taymiyya et al-Fâriquî et les frappa devant ‘Assâf !! L’adjoint du sultan fit emprisonner le cheikh de l’islam pour une courte période en l’accusant d’avoir poussé le peuple (à se venger) !! 

Plus tard al-Hamawî déclara qu’Ibn Taymiyya et al-Fâriquî étaient innocents, il les convoqua et leur donna satisfaction. En réponse à cet évènement, le cheikh de l’islam composa le livre « L’épée dégainée contre celui qui insulte le Messager  الصارم المسلول على شاتم الرسول » qui reste une science utile pour la Communauté.

Ibn Taymiyya رحمه الله fut l’objet de nombreux débats sur sa croyance  العقيدة et à chaque fois, il confirmait la croyance des salafs et la défendait. Cette fois-ci, il fut emprisonné pour la croyance qu’il défendait (conforme à celle des pieux prédécesseurs) concernant Le Trône, La Parole et An-Nouzoul النزول  mais la véritable raison était l’hostilité de ceux qu’il réfutait et dont il démontrait l’égarement. Ces personnes prirent des dispositions contre lui auprès du pouvoir et excitèrent la colère de l’émir Rukn a-Dîn al-Jâchankîr. Parmi eux, on trouve le juge malikite Ibn Makhlouf (un des plus farouches opposants d’Ibn Taymiyya) et le cheikh de l’émir, Nasr al-Manbijî (un soufi, respecté de l’émir).

La cause de cela vient du fait qu’Ibn Taymiyya رحمه الله avait envoyé ses fatwas et ses livres en Égypte, appelant ses habitants à la vérité, démontrant l’erreur du soufisme, du panthéisme et d’autres choses. Les ennemis de la vérité ont donc mis l’émir en colère contre le cheikh de l’islam en falsifiant des faits et en mentant. Certains ont même écrit un livre mensonger sur Ibn Taymiyya رحمه الله , l’ont fait parvenir à l’émir en disant que telle était la croyance d’Ibn Taymiyya ! 

C’était la raison principale de cette affaire mais on peut y ajouter d’autres raisons comme la jalousie envers la place qu’Ibn Taymiyya رحمه الله tenait au sein de l’état, envers sa façon unique d’ordonner le bien et d’interdire le mal, envers l’obéissance des gens à son égard et envers sa mise en pratique de la vérité. Le résultat de tout cela fut l’emprisonnement d’Ibn Taymiyya رحمه الله durant un an et demi au Caire.

Après sa sortie de prison au mois de Rabî’ al-Awwal de l’an 707 H, Ibn Taymiyya رحمه الله resta en Égypte où il enseigna, émit des fatwas et appela les gens à Allah تعالى. Il parlait sur les minbars, dans les mosquées, du tafsir du Coran et sur d’autres sujets, et ce après la prière du Vendredi jusqu’à l’asr. De nombreuses personnes en profitèrent mais cela ne plaisait pas à ses adversaires qui n’aimaient pas le voir appeler les gens au Coran et à la Sounna.

Un groupe important de soufis se réunit donc au Caire et se mirent d’accord pour se plaindre d’Ibn Taymiyya رحمه الله auprès du Sultan. Un conseil fut donc tenu le 3 Chawwâl de l’an 707 H. La discussion portait sur l’appel à l’aide الإستغاثة et le tawassoul التوسل auprès des créatures et sur Ibn ‘Arabî. Les réponses d’Ibn Taymiyya رحمه الله démontrèrent sa science et la solidité de ses arguments. Les gens ont vu que ses paroles étaient justes et correctes mais le juge le condamna quand même. Il resta quelques jours en prison puis il repartit pour Damas. Il s’en suivit de cet évènement la rédaction, par Ibn Taymiyya, du livre « L’appel à l’aide الإستغاثة en réponse à al-Bakrî »

Le 18 Chawwâl 707 H, alors que le cheikh de l’islam était en route pour Damas, Nasr al-Manbijî (un soufi), à l’origine de la convocation d’Ibn Taymiyya en Égypte et de son emprisonnement, décida de le faire revenir pour le mettre en prison. Il fut donc présenté aux juges et aux jurisconsultes الفقهاء mais ces derniers n’étaient pas d’accord entre eux. Voyant cela, Ibn Taymiyya رحمه الله « J’irai en prison et je suivrai l’intérêt général ».

Il resta en prison environ 3 mois et demi. Durant cette période, les gens lui rendaient visite et lui demandaient des fatwas. Il recevait même des questions difficiles de la part de princes et de jurisconsultes auxquelles il répondait alors qu’il était en prison !

Le premier Rabî’ al-Awwal de l’an 709 H, un décret fut émis contre Ibn Taymiyya رحمه الله à Alexandrie. Des cheikhs vinrent lui dirent: « Ils font tout cela jusqu’à ce que tu sois d’accord avec eux. Ils cherchent à te tuer, t’exiler ou t’emprisonner » Il leur dit alors: « Si je suis tué, ce sera un martyr شهادة pour moi, s’ils m’exilent, ce sera une émigration هجرة pour moi, s’ils m’exilent à Chypre, j’appellerai ses habitants à Allah تعالى et ils répondront إن شاء الله à mon appel et s’ils m’emprisonnent, j’aurai un lieu d’adoration. Je suis comme le mouton, où que je me tourne, je me tourne sur de la laine » 

Nasr al-Manbijî et al-Jâchankîr rusèrent une nouvelle fois contre le cheikh de l’islam. Ils l’envoyèrent seul, sans escorte, à Alexandrie. Ibn Kathîr رحمه الله (qui était un des élèves d’Ibn Taymiyya رحمه الله ) a dit à ce sujet: « Ils ont voulu l’envoyer à Alexandrie en tant qu’exilé, dans l’espoir qu’un des habitants se montre insolent envers lui et l’assassine, ils seraient alors débarrassés de lui. Mais cela ne fit qu’accroître l’amour des gens pour lui, leur rapprochement de lui, leur recherche à bénéficier de sa science et leur préoccupation pour lui » (Le début et la fin الباية والنهاية 84/18 )

Lorsque An-Nâssir Mouhammad ibn Qualâwoun prit le pouvoir en 709 H, il libéra Ibn Taymiyya رحمه الله , le fit venir au Caire et l’honora. Il tua al-Jâchankîr et éloigna le soufi Nasr al-Manbijî qui mourut dans sa zâwiya. 

L’emprisonnement dura cette fois-ci 7 mois et 7 jours. On sait que le cheikh de l’islam fut emprisonné à plusieurs reprises à cause des complots de certains juristes et juges d’Égypte mais lorsqu’Ibn Taymiyya رحمه الله fut en position de force et qu’ibn Qualâwoun le consulta à leur sujet, il comprit alors que le sultan voulait les tuer car il leur en voulait de l’avoir destitué et prêté allégeance à al-Jâchankîr. Le cheikh de l’islam ne profita pas de cette occasion pour se venger de ces personnes, non, il s’est mis à dire du bien d’eux et à les remercier puis il dit au sultan: « Si tu tues ces gens, tu n’en trouveras pas de semblable après eux »Le sultan dit alors: « Ils t’ont fait du tort et ont voulu te tuer à plusieurs reprises ». Le cheikh répondit: « Celui qui m’a fait du mal est absous, celui qui fait du tort à Allah تعالى et à Son Messager ﷺ, Allah se vengera de lui. Quant à moi, je ne me vengerai pas pour moi-même » Ibn Taymiyya رحمه الله apaisa le sultan qui finit par leur pardonner. 

Suite à cela, le juge malikite Ibn Makhlouf (qui était un farouche opposant d’Ibn Taymiyya) dira: « Nous n’avons vu personne de plus pieux qu’Ibn Taymiyya. Nous avons tout fait contre lui et quand il a eu le pouvoir sur nous, il nous a pardonnés. »

Le cheikh de l’islam s’installa au Caire et se remit à enseigner et instruire. Le peuple, les étudiants, les princes et d’autres personnes le visitaient régulièrement afin de profiter de sa science et demander des fatwas. Certains s’excusaient auprès de lui de ce qui s’était passé, il disait alors: « J’ai absous tout le monde de ce qui s’est passé ». 

Ibn Taymiyya رحمه الله resta en tout 7 ans en Égypte durant lesquels il fut emprisonné 4 fois pour une durée totale d’environ 2 ans et demi. Durant son séjour, il écrivit de nombreux ouvrages, c’est ainsi qu’agit celui qui voit le bienfait des épreuves et transforme ces épreuves en bienfaits. Ibn Rajab رحمه الله , énumérant les livres écrits par le cheikh de l’islam en Égypte, dit: « Citons quelques noms d’œuvres majeures: Le livre de la foi (1 volume), Le livre de la droiture الإستقامة (2 volumes), La réponse aux objections égyptiennes sur les fatwas hamaouies (de la ville de Hama en Syrie) (4 volumes), La tromperie d’al-Jahmiya dans l’établissement de leurs innovations (bid’as) théologiques (6 gros volumes), Livre de l’épreuve égyptienne (2 volumes), Les questions alexandrines (1 volume) et Les fatwas égyptiennes (7 volumes)… »

Ibn Taymiyya رحمه الله quitta le pays le 8 Chawwal de l’année 712 H pour se rendre à Damas, en compagnie du sultan pour aller à la rencontre des Tatars. Les gens se réjouirent de son retour et de nombreuses personnes vinrent l’accueillir. 

Après son retour à Damas, Ibn Taymiyya رحمه الله reprit l’enseignement, il écrivait et donnait des fatwas. Ce fut la période la plus féconde de sa vie pour composer et écrire des ouvrages. Il se consacra à la recherche, à l’examen des questions ainsi qu’à la précision des réponses. Parmi les sujets dont il avait parlé, il y avait le serment de divorce (divorce lié à une condition émise sous forme de serment). 

Pour le cheikh de l’islam, le serment de divorce, lié à une condition, sans intention de mettre le divorce à exécution mais avec l’intention de confirmer, d’empêcher ou d’inciter ne constitue pas un divorce. Cependant celui qui jure doit expier son serment s’il l’enfreint (voir: ICI ) Par contre si, par la condition qu’il a prononcée dans sa phrase, le mari avait l’intention de répudier sa femme alors dans le cas où la condition sera remplie, son divorce sera alors effectif. Tel était l’avis d’ Ibn Taymiyya رحمه الله sur cette question et il s’en explique en disant: « Je ne connais aucun Compagnon رضي الله عنهم qui ait délivré une fatwa disant que le serment implique le divorce effectif – c’est-à-dire en cas de sa violation. De même que je ne connais aucun d’eux qui ait délivré une fatwa disant que le divorce prononcé, en étant lié à une condition qui a le sens d’un serment, est un divorce effectif… »

Sur ce point, il était en désaccord avec avec les jurisconsultes الفقهاء de son époque qui considéraient que le serment de divorce entraînait le divorce en cas de parjure. Mais pour lui, c’était un serment car telle était l’intention. En 718 H, on lui demanda donc de ne pas donner cette fatwa. Ibn Taymiyya رحمه الله accepta durant un certain temps puis il recommença à émettre cette fatwa. Au mois de Rajab de l’an 720 H, une séance s’est tenue à laquelle ont assisté le représentant de l’autorité, les juges et les jurisconsultes, en présence d’Ibn Taymiyya رحمه الله . Ils décidèrent de l’emprisonner, il fut donc incarcéré dans la citadelle. Le cheikh de l’islam en profita pour écrire des livres, des fatwas et de nombreuses réfutations. Ibn Taymiyya رحمه الله resta presque 6 mois en prison jusqu’à ce qu’un décret du sultan ordonne sa libération. Il fut donc libéré le jour d’Achoura de l’année 721 H.

Ibn Taymiyya رحمه الله consacra sa vie à la science, l’enseignement, l’examen des questions, à l’appel au Livre et à la Sounna selon la compréhension des pieux prédécesseurs السلف de la Communauté, à démontrer l’absence de contradiction entre la raison et an-naql النقل (ce qui a été transmis: versets, hadiths)…etc 

Parmi les questions qui reviennent souvent dans ses écrits, on trouve celle sur le tawassoul التوسل et l’appel à l’aide الإستغاثة . (Consulter à ce sujet « Le tawassoul légal et celui innové » et « Divers types de demande d’aide » ).

Le cheikh de l’islam a parlé de la question du voyage afin de visiter les tombes, y compris celle du Prophète ﷺ en se basant sur le Livre et la Sounna et son avis était qu’on ne voyage pas pour visiter les tombes mais pour aller à la mosquée du messager d’Allah ﷺce qui inclut bien sûr la visite de sa tombe. Il fut emprisonné pour cela !

Cet emprisonnement est l’un des plus étranges qu’Ibn Taymiyya رحمه الله ait connus ! En effet, il n’est pas venu avec quelque chose de nouveau. L’interdiction de voyager pour se rendre sur la tombe du Prophète ﷺn’est pas quelque chose qu’il a inventé, des savants avant lui et après lui on dit la même chose, alors pourquoi s’en prendre tout particulièrement au cheikh de l’islam sur ce point ? Il n’y a pas de raison sauf celle de diffamer Ibn Taymiyya رحمهالله et de chercher n’importe quel prétexte pour lui nuire !

On lui attribua des choses qu’il n’avaient pas dites, ses paroles furent déformées et cela lui causa un grand préjudice ! SI ses ennemis faisaient cela de son vivant alors qu’il pouvait se défendre, que pensez-vous qu’ils feront après sa mort ?… Le cheikh de l’islam fut donc emprisonné injustement dans la citadelle le 6 Cha’bân 726 H. Il était très calme quand on lui annonça la nouvelle et voyait dans cela un grand bien. Le 10 du même mois, un décret lui interdit de donner des fatwas. Son élève Ibn Al-Qayyim رحمه الله fut également emprisonné dans la forteresse.

Ibn Taymiyya رحمه الله profita de son emprisonnement pour écrire. Allah تعالى lui facilita la tâche et il écrivit des lettres, des fatwas et composa son livre « Réponse à al-Ikhnâî الردعلىالإخنائي» ( L’imam al-Ikhnâî (658-750 H) était un soufi et le juge en chef d’Égypte). Ce livre est une réponse au livre de cet imam qui pense qu’il est permis de voyager afin de visiter les tombes.

En l’an 728 H, un décret fut publié interdisant Ibn Taymiyya رحمه الله d’écrire. On lui confisqua les livres qu’il avait avec lui, ses feuilles, son encrier et sa plume. Il se mit donc à écrire avec du charbon. Ses compagnons réussirent à faire publier une partie des écrits qu’il composa durant cette période et ces écrits devinrent connus. 

Dans sa cellule, le cheikh de l’islam se consacra à l’adoration, à la récitation du Coran, au dhikr, aux prières nocturnes…Durant son dernier séjour en prison, il termina la lecture du Coran 80 fois. Le vingtième jour de Dhul l-Qi’dah en 728 H, au cours de sa 81ème lecture, il récita les 2 derniers versets de la sourate La lune « Certes les pieux seront dans des Jardins et (parmi) des rivières. Dans un séjour de vérité, auprès d’un Souverain Omnipotent » puis il prononça la chahada الشهادة et il mourut ! Qu’Allah تعالى lui fasse miséricorde.

Certains soufis considèrent Ibn Taymiyya رحمه الله comme un de leurs plus grands ennemis. C’est ainsi qu’ils apprennent à leurs adeptes à détester le cheikh de l’islam en l’accusant de tous les maux. D’autres soufis, quant à eux, essaient de le faire passer pour l’un des leurs en présentant les arguments suivants:

a) Il a dit du bien de certains soufis

Réponse: Il est vrai qu’il a fait l’éloge de certains soufis mais il faisait la différence entre les premiers soufis qui suivaient le Coran et la Sounna et les autres. Faire l’éloge de quelques personnes soufies ne signifie pas faire l’éloge du soufisme dans son ensemble et cela ne veut pas dire non plus qu’il en faisait partie. D’ailleurs nombre de ses écrits expliquent et réfutent les erreurs et égarements des voies soufies.

b) Il est enterré dans un cimetière soufi

Réponse: les cimetières soufis ne sont pas réservés aux seuls soufis, d’autres musulmans y sont enterrés. Ibn Taymiyya a tout simplement été enterré près de son frère Charaf Ad-Din Abdoullah.

A) Le réformateur doit allier patience et connaissance car si l’une de ces 2 choses vient à manquer, le préjudice sera important, pas seulement pour lui mais aussi pour tout le programme d’appel à l’islam. C’est une question que beaucoup de jeunes ne comprennent pas. Un grand nombre d’entre eux appellent à la religion, de manière incorrecte, sans science, ce qui fait que leur préjudice est plus grand que leur utilité.

Il convient donc pour celui qui veut réformer lui-même et sa Communauté de chercher le savoir de manière correcte, auprès des savants pieux et se fonder sur cela afin d’être comme Allah عز وجل dit: « Dis: « Voici ma voie, j’appelle (les gens à la religion) d’Allah, moi et ceux qui me suivent, nous basant sur une preuve évidente… » (12 Youssouf: 108) 

Il a également besoin de beaucoup de patience car il ne doit pas reculer lorsqu’on a grand besoin de lui sinon il entraînera avec lui un grand nombre de ceux qui le prennent comme un exemple à suivre.    

B) L’épreuve devient récompense. Bien qu’Ibn Taymiyya رحمه الله fut emprisonné injustement, cela n’a pas éteint la flamme de son amour pour le bien. Ces emprisonnements n’ont pas entravé son cœur et sa pensée. Au contraire, il en a profité pour écrire de nombreux livres. Il a aussi tenu des débats en prison, conseillé les gens et expliqué la vérité. 

C) Accueillir l’épreuve par le remerciement. Bien que la prison soit un endroit étroit, une énorme épreuve et tentation, Ibn Taymiyya رحمه الله considérait, quant à lui, qu’elle était le lieu de la louange et du remerciement. Lorsqu’il fut exilé à Alexandrie, il se rendit à la porte de la prison et quelqu’un lui dit: « Monsieur ! Ceci est le lieu de la patience » Il lui répondit: « C’est plutôt le lieu de la louange et du remerciement. Par Allah, Il fait descendre sur mon cœur une joie et un bonheur si grands que s’ils étaient partagés entre les habitants du Châm et de l’Égypte, il en resterait encore. Et si j’avais de l’or ici et que je le dépensais, je n’aurais pas payé le dixième de ce bienfait dans lequel je suis » 

Il a dit également: « De quoi aurais-je peur ? Si je suis tué, je serai parmi les meilleurs martyrs, la miséricorde et la satisfaction seront sur moi jusqu’au Jour de la Résurrection. Et celui qui me tuera aura sur lui la malédiction perpétuelle ici-bas et le châtiment dans l’au-delà. Que tous ceux qui croient en Allah et en Son Messager sachent que si je suis tué pour la religion d’Allah ou si je suis emprisonné alors l’emprisonnement est pour moi l’un des plus grands bienfaits d’Allah envers moi. Et par Allah, je n’arrive pas à Le remercier suffisamment pour ce bienfait. Je n’ai pas ce que les gens ont peur de perdre, pas de troupeaux, pas d’école, pas de biens, pas de leadership ni de prestige. »

D) Ibn Taymiyya n’a jamais été emprisonné pour takfîr التكفير (c’est-à-dire accuser les autres d’incroyance), pourtant ses adversaires ne cessent de répéter et de propager l’idée  qu’il est un takfirî et que de nombreux groupes « extrémistes » ne font que suivre sa voie et ses idées ! De plus, cette calomnie est répandue de toutes les façons possibles ! 

Ce n’est pas la faute d’Ibn Taymiyya رحمه الله si des extrémistes se réfèrent à lui, interprètent mal ses propos et acceptent certaines de ses paroles tout en laissant d’autres. Ces gens ne cessent de tirer leurs arguments du Coran et de la Sounna, peut-on dire pour autant que l’erreur vient du Livre et de la Sounna ? Non, elle provient en réalité de leur compréhension déformée.  

Ce qui est étrange, c’est que les adversaires de l’époque d’Ibn Taymiyya رحمهالله  ne l’ont jamais accusé d’être un moukaffir مُكَفِّر (qui accuse les autres d’incroyance) malgré leur vive hostilité et toutes les méthodes qu’ils ont utilisées pour lui nuire ! Pensez-vous que de telles personnes auraient négligé une question aussi évidente et grave que le takfîr et se seraient tourné vers d’autres accusations si Ibn Taymiyya رحمهالله était vraiment un moukaffir ??!

Il est important de se poser cette question quand on voit les légions des ennemis des gens de la Sounna et du Groupe (al-Jamâ’a الجماعة ) accuser Ibn Taymiyya رحمه الله d’être un moukaffir (ou takfirî) rigoriste. Parmi les savants de son époque, qui l’ont côtoyé, ont lu ses écrits, l’ont jugé, ont discuté, argumenté et débattu avec lui, jamais personne ne l’a accusé une seule fois d’être un moukaffir ou l’a emprisonné pour cela.

Il est étrange que des personnes disent qu’Ibn Taymiyya رحمهالله est un takfirî alors que quiconque lit l’histoire de son époque trouvera qu’en fait ce sont certains de ses adversaires qui l’ont accusé d’incroyance et ont demandé qu’on lui coupe la langue, voire qu’on le tue ! Par contre, plus tard, lorsque le sultan consulta le cheikh de l’islam afin d’exécuter ces gens, Ibn Taymiyya رحمه الله dit alors du bien d’eux pour préserver leur vie !

Le juge Ibn Makhlouf condamna Ibn Taymiyya رحمه الله , durant son jugement, il fut interrogé sur sa croyance, mais ce juge refusa d’entendre ses arguments puis le fit enfermer dans une très mauvaise prison ( les conditions de vie y étaient exécrables). Malgré tout cela, le cheikh de l’islam a dit à propos d’Ibn Makhlouf : « Et Ibn Makhlouf, quoiqu’il fasse, par Allah, je ne peux pas faire de bien sans l’accomplir avec lui et je n’aiderai jamais son ennemi contre lui. Il n’y a de force et le puissance qu’en Allah. Telle est mon intention et ma détermination, en sachant bien tout ce qui s’est passé. Je sais que le diable sème la discorde parmi les croyants et je ne serai pas une aide pour le diable contre mes frères musulmans ! »

Ibn Taymiyya رحمه الله , que l’on accuse d’être un moukaffir, est le même qui a dit: «…Je suis l’une des personnes les plus opposées à ce qu’un individu soit accusé de mécréance, d’immoralité ou de désobéissance sauf si l’on sait que la preuve, provenant du message de l’islam, a été établie contre lui… ». Il a dit également: « Je suis patient avec celui qui me contredit, même si lui transgresse les limites d’Allah à mon égard, en m’accusant d’incroyance, d’immoralité, de mensonge ou d’intolérance insensée et bien moi, je ne transgresse les limites d’Allah à son égard. Je veille plutôt à mes paroles et mes actions, je les pèse sur la balance de la justice et je fais qu’elles soient conformes au Livre qu’Allah تعالى a révélé et en a fait un guide pour les gens et un juge dans leurs divergences. Allah عز وجل dit: « Les gens formaient (à l’origine) une seule communauté (croyante). Puis (après leurs divergences), Allah envoya des Prophètes comme annonciateurs (de bonnes nouvelles) et avertisseurs; et Il fit descendre avec eux le Livre contenant la vérité, pour juger entre les gens ce sur quoi ils divergent… » ( La vache: 213) » 

Tout au long de sa vie, Ibn Taymiyya رحمه الله passa d’une épreuve à une autre, d’un procès  à un autre, d’une prison à une autre…Il a subi toutes sortes de préjudices: il lui fut interdit de délivrer des fatwas et d’enseigner, il fut dénigré de partout, banni, persécuté et emprisonné. Les gens qui suivent l’erreur أهل الباطل en sont même arrivés à l’accuser d’incroyance, ils ont conspiré pour le tuer mais Allah عز وجل l’a protégé ! Le plus triste est que ces attaques ne venaient pas des ennemis de l’islam mais de ses opposants parmi les musulmans ! Avec ces 7 emprisonnements, Ibn Taymiyya رحمه الله passa plus de 5 ans de sa vie en prison. 

La jalousie et la rancune de ses détracteurs expliquent, en grande partie, les attaques subies par Ibn Taymiyya رحمهالله. En effet, on sait que le cheikh de l’islam jouissait d’un rang élevé auprès des gens, surtout après ses célèbres positions contre les Tatars alors que beaucoup de jurisconsultes et de juges fuyaient Damas par peur d’une mort imminente. Quant à Ibn Taymiyya رحمه الله , il était là à raffermir les gens, leur récitant les versets sur le jihad, leur jurant qu’ils seraient victorieux. Il n’est pas resté les bras croisés devant ces tyrans ! Il est également intervenu personnellement et à fait libérer les prisonniers musulmans et chrétiens des Tatars durant le mois de Rajab de l’an 699 H. Ses paroles étaient influentes auprès du peuple, ce n’était pas le cas des juges qui l’ont accusé et condamné.

De même, il a cassé les étendards qui avaient été dressés pour appeler les gens aux zâwiyas, aux takiyyas (endroits pour les soufis), à l’incarnation الحُلُول et à l’union avec le divin الإتحاد. Ibn Taymiyya رحمه الله appelait les gens à la croyance pure, la même que celle des Compagnons رضي الله عنهم et des pieux prédécesseurs de la Communauté. C’est pourquoi nous avons vu que Nasr al-Manbijî (un soufi, proche de l’émir) retournait souvent les autorités contre Ibn Taymiyya رحمه الله pour le faire enfermer car le cheikh de l’islam avait réfuté ses erreurs ! 

Un jour, le cheikh de l’islam évoqua les épreuves les plus importantes auxquelles il fut confronté, en disant: « Que peuvent me faire mes ennemis ? Mon paradis et mon jardin sont dans mon cœur, où que j’aille, ils sont avec moi et ne me quittent pas. Ma prison est un lieu de recueillement, me tuer est un martyre شهادة et m’expulser de mon pays est un voyage »

Les paroles de vérité ne peuvent être enchaînées, toutes ces épreuves s’en sont allées mais la science, la mémoire et les nobles qualités du cheikh de l’islam demeurent. oummatoukoum, le 29/12/1446- 25/6/25.

Références:

ICI   بينَ محاكماتِ الأمس وافتراءَاتِ اليوم (لماذا سُجِنَ ابن تيمية؟)

ICI   ابن تيمية يموت وهو يقرأ القرآن

 ICI  موقف ابن تيمية من التصوف

ICI  في توجيه ثناء ابن تيمية على الجُنَيْد سيد الطائفة الصوفية

Pourquoi Ibn Taymiyya a-t-il été emprisonné ?
Ibn Taymiyya était-il un soufi ?

Comprendre et combattre le wawâs

Le wawâs qui appelle l’individu à écouter ou voir des choses interdites, ou à commettre des turpitudes, les enjolivant à ses yeux, a trois origines: l’âme qui incite au mal « …l’âme est très incitatrice au mal… » (12 Youssouf: 53), les diables parmi les djinns et les diables parmi les humains.  

Allah تعالى nous dit au sujet de l’âme: « Nous avons effectivement créé l’homme et Nous savons ce que son âme lui suggère تُوَسْوِسُ  et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire » (50 Qâf: 16)Au sujet des diables faisant partie des djinns, Il nous dit: « Puis le diable le tenta فَوَسْوَسَ en disant: « Ô Adam, t’indiquerai-je l’arbre de l’éternité et un royaume impérissable ? » (20 Tâ-Hâ: 120)

Et concernant les diables humains, Le Très Haut nous dit: « Dis : « Je cherche protection auprès du Seigneur des hommes, Le Souverain des hommes, Dieu des hommes, contre le mal du mauvais conseiller الوَسْواس, furtif, qui souffle le mal يُوَسْوِسُ dans les poitrines des hommes, qu’il (le mauvais conseiller) soit un djinn ou un être humain » (sourate 114 Les Hommes)

Le wawâs du diable cesse quand on se réfugie auprès d’Allah contre le démon. Le wawâs de l’âme disparaît également par la demande de refuge et par le renforcement du lien entre le serviteur et son Seigneur en accomplissant des actes d’obéissance et en abandonnant les actes répréhensibles. 

Ibn Taymiyya رحمه الله a rapporté qu’Abou Hâzim a dit au sujet de la différence entre le wawâs de l’âme et celui du diable : « Tout ce que ton âme déteste pour toi-même provient du diable, alors cherche refuge auprès d’Allah contre lui et tout ce que ton âme aime pour toi-même vient de ton âme alors interdis-lui » ( مجموعالفتاوى). C’est-à-dire que souvent, l’âme tente l’individu par des choses qui ont rapport avec les désirs que les gens ont habituellement.

Certains savants ont mentionné une autre différence importante à savoir que le wawâs du diable consiste à embellir le péché afin que le musulman le commette et si le diable n’y parvient pas alors il passe à un autre péché et ainsi de suite. Le diable n’est pas intéressé qu’il commette un péché particulier autant qu’il est intéressé par la désobéissance de ce musulman à son Seigneur. Cela équivaut à faire ce qui est interdit et laisser ce qui est obligatoire et tout cela ce sont des péchés.

Quant au wawâs de l’âme, c’est celui qui pousse la personne à commettre un péché spécifique, de façon répétée. (1)

Le Prophète ﷺ a dit : « Le moment où le serviteur est le plus proche de son Seigneur est lorsqu’il est prosterné; alors multipliez les invocations (dans cette posture) » (Mouslim). La prière fait partie des plus grands et des plus importants actes d’adoration durant laquelle l’adorateur se rapproche d’Allah تعالى et plus le serviteur est humble et soumis, plus il est proche d’Allah عز وجل. Placer le visage et le nez sur le sol est le summum de l’humilité et de la soumission. Dans cette position, l’invocation, venant d’un cœur soumis et humble pour Allah تعالى , est plus proche d’être exaucée. 

Dans ce hadith, le Prophète nous apprend que le serviteur, lorsqu’il est prosterné, est le plus proche d’Allah سبحانه وتعالى , il nous enseigne à multiplier les invocations durant la prosternation car il est plus digne qu’Allah تعالي y exauce l’invocation de l’adorateur . (2)

Le diable est notre ennemi, il aime nous éloigner de notre Créateur c’est pourquoi il fera tout pour nous déranger dans notre prière. Son arme, dans ce cas, est le wawâs qu’il utilise contre l’adorateur pour le faire douter de son ablution, de son intention et de sa prière. Si le croyant répond à ce wawâs, ce dernier va augmenter progressivement et s’aggraver jusqu’à ce que faire la prière devienne pour lui une vraie souffrance. 

Ceux qui ne connaissent pas ce problème ont du mal à le comprendre mais ceux qui l’endurent savent très bien ce dont il s’agit. Ce piège diabolique fait malheureusement de nombreuses victimes qui souvent interrogent les savants afin de les aider à sortir de cette spirale infernale. Afin de mieux cerner le problème, voici les témoignages de personnes qui demandent conseil aux savants à ce sujet.

Quelqu’un interroge le cheikh ibn Baz رحمه الله en disant: « Je refais souvent les ablutions pour la prière. Cela m’est-il permis ? Que me conseillez-vous ?… »

Réponse: « Tu dois te méfier des waswâs, lorsque tu fais les ablutions, ne les recommence pas et quand tu pries, ne refais pas la prière, laisse le waswâs et cherche refuge auprès d’Allah contre le diable lapidé. Quand tu fais les ablutions فالحمد لله n’obéis pas au diable et lorsque tu pris فالحمد لله n’obéis pas au diable sinon il te dominera. Souffle en crachotant sur ta gauche, même si tu es dans la prière, souffle en crachotant ( النَفْث ) sur ta gauche 3 fois et dis : «  أعوذ بالله من الشيطان الرجيم (je me réfugie auprès d’Allah contre le diable lapidé) » en tournant ton visage légèrement sur la gauche…

Cherche souvent refuge auprès d’Allah de cette façon, même en dehors de la prière, contre le wawâs car si l’ennemi voit de la douceur de ta part, il va te convoiter et te nuire par le wawâs, il faut donc prendre garde à lui. ( D’ailleurs Allah تعالى nous dit: ) « Certes le diable est pour vous un ennemi. Prenez-le donc comme ennemi… » ( 35 Le Créateur: 6). 

On a fait la remarque suivante au cheikh رحمه الله : « En vérité, en cette période, on trouve beaucoup de personnes qui souffrent du fait de refaire la prière et les ablutions. Quelle est la bonne directive pour eux ? جزاك الله خيرا »

Réponse: « Tout cela vient de leur obéissance au diable et de leur faiblesse. S’ils étaient forts, ils vaincraient l’ennemi d’Allah. Ils doivent être forts, être hostiles à l’ennemi d’Allah et chercher refuge auprès de leur Seigneur contre lui. Ils ne doivent pas se montrer accommodants avec le wawâs. Si quelqu’un (parmi ces personnes) a fait les ablutions puis se dit « J’ai peur que ne n’ai pas fait ceci ou cela… » Il ne doit pas recommencer ses ablutions car elles sont terminées والحمد لله . Même chose pour la prière, si après avoir prié il se dit « J’ai peur d’avoir oublié quelque chose » Non, lorsqu’il a prié الحمد لله , la prière est finie, qu’il la considère comme étant terminée et qu’il abandonne ce wawâs. » (3)

Un jour, ‘Outhman ibn Abî al-‘Âs رضي الله عنه est venu voir le Prophète ﷺ et il a dit: « Ô Messager d’Allah! Le diable s’interpose entre moi et entre ma prière et ma récitation, il m’embrouille. Le Messager d’Allah ﷺ dit alors: « Celui-là est un diable que l’on appelle Khanzab (خَنْزَب ), lorsque tu sens sa présence, cherche refuge auprès d’Allah contre lui et  crachote sur ta gauche trois fois » Il dit: « J’ai fait cela et Allah l’a fait partir » (Mouslim)

Explication du hadith: Le recueillement est l’âme de la prière, cela exige de la personne qu’elle vide son cœur des préoccupations qui vont la détourner de la prière. Mais le diable guette le musulman dans sa prière afin de le dépouiller du recueillement et lui gâcher la prière.  

« Ô Messager d’Allah! Le diable s’interpose entre moi et entre ma prière et ma récitation » : c’est-à-dire il me détourne, me distrait dans ma prière et m’empêche d’y éprouver du plaisir et faire le vide pour m’y recueillir. Il est possible que le sens soit: il s’interpose entre moi et ma perception de la prière, il me fait douter du nombre de rakâtes, de la récitation et il m’embrouille; je ne sais donc plus combien (de rakâtes) j’ai priées ni la manière dont j’ai récité la Fatiha et les autres sourates.

«  il m’embrouille » : durant la prière, il m’embrouille et me fait douter par les wawâs et l’oubli.

« Le Messager d’Allah ﷺ dit alors: « Celui-là est un diable que l’on appelle Khanzab (خَنْزَب ) » : celui qui t’embrouille dans ta prière et ta récitation est un diable spécial parmi les démons, pas leur chef, et son mon est Khanzab. Le Prophète ﷺ lui a ordonné, s’il sentait sa présence de chercher refuge auprès d’Allah contre lui car il n’y a pas d’autre moyen d’échapper à son wawâs que de chercher refuge auprès d’Allah contre lui en disant « Je cherche refuge auprès d’Allah contre le diable lapidé ( أعوذ بالله من الشيطان الرجيم) » 

« et crachote sur ta gauche trois fois » : … il fait cela 3 fois pour amplifier l’éloignement. Le Prophète lui a ordonné sur la gauche car le diable vient de ce côté parce que le cœur est plus proche de la gauche et le diable ne vise que le cœur. ‘Outhman رضي الله عنه a fait ce le Prophète ﷺ lui a ordonné et Allah عز وجل a fait partir ce diable et ses wawâs. Ce hadith prouve que le diable obsède la personne qui prie et l’embrouille. (4) 

Dans ce témoignage, la personne explique qu’elle souffre d’un wawâs tellement fort, concernant l’intention, qu’elle en arrive à abandonner des prières, même celle du Vendredi. (Pour plus de détails sur son témoignage, en arabe, consulter la référence 4)

Réponse : Nous demandons à Allah العظيم, Seigneur du Noble Trône, de t’accorder la guérison le plus tôt possible, de te soulager, d’illuminer ton cœur et de te donner le repos et la sérénité. Sache que le wawâs est une maladie qui tourmente la personne et vient à elle sous la forme d’actes et de pensées qui la dominent et l’obligent à les répéter. Et lorsque cet individu ne recommence pas l’action ou ne suit pas l’idée (qui l’obsèdent), il ressent une tension et une angoisse et (pense) que ce qu’il a fait n’est pas valide. Cette tension ne cesse que s’il refait l’action et suit l’idée (qui l’obsède). (Cette maladie) est une exagération hors de toute modération. Il se peut qu’il fasse une chose à plusieurs reprises  jusqu’à oublier le but de cette action comme refaire plusieurs fois les ablutions jusqu’à manquer la prière ou bien répéter un verset ou autre chose (dans la prière) jusqu’à ce que l’imam le devance d’un ou de plusieurs piliers (de la prière). Il se peut que le wawâs domine la personne alors elle abandonne complètement l’action, comme c’est votre cas, et c’est d’ailleurs le but fondamental de ce wawâs.

I) Le diable qui y joue le plus grand rôle. Un jour un homme est venu voir le Prophète et lui a dit: « Ô Messager d’Allah ! Il arrive certes que l’un de nous trouve, dans son for intérieur, quelque chose qui lui vient à l’esprit et il préfèrerait être de la cendre que d’en parler ! » Il dit alors : « Allah est plus grand, Allah est plus grand, Allah est plus grand ! Louange à Allah Qui renvoie sa ruse (la ruse du diable) à (l’état) de wawâs ! »  (Ahmad- Abou Dâwoud : isnad sahîh). C’est pourquoi il ne faut pas vous préoccuper de cette chose qui vous dérange et vous angoisse.

II) Des facteurs psychologiques, éducatifs ou un évènement (ou une situation) qui a eu un fort impact sur l’esprit de la personne atteinte. Dans en tel cas, l’individu malade est orientée vers un psychiatre musulman. 

(NdT: on peut ajouter également que lorsqu’une personne est touchée par la magie ou le mauvais œil, elle devient plus sensible aux wawâs diaboliques. Dans ce cas, une roqya sera d’une aide précieuse par permission d’Allah Le Tout Puissant) 

I) Se réfugier auprès d’Allah تعالى avec vérité et sincérité afin qu’Allah عز وجل fasse disparaître de toi cette maladie

II) Lire beaucoup le Coran et faire assidument le dhikr, surtout les invocations du matin et du soir, celles avant de dormir et lors du réveil, celles pour entrer ou sortir de la maison, celles avant d’entrer ou en sortant des toilettes. Prononcer le Nom d’Allah avant de manger et faire Sa louange après…etc. Nous te conseillons d’acheter le livre des invocations de l’imam A-Nawawî رحمه الله et toujours y revenir.

III) Chercher refuge auprès d’Allah contre le diable lapidé et arrêter de s’abandonner aux idées immondes du démon, c’est la chose la plus utile pour faire disparaître le wawâs. Il a été rapporté qu’une personne parmi les pieux éprouvés par le waswâs , disait au diable lorsque ce dernier lui suggérait, après la prière, que ses ablutions ou sa prière n’étaient pas corrects: « Je ne l’accepte pas de toi tant que tu ne me ramènes pas deux témoins équitables (qui confirment) ce que tu dis ». 

Le plus grand remède au wawâs est de s’en détourner et de ne pas le croire. D’ailleurs, le Prophète ﷺ a dit: « Le diable vient à l’un de vous et dit: « Qui a créé ceci et cela? » jusqu’à lui dire: « Qui a créé ton Seigneur? » Lorsqu’il (le diable) arrive à cela, cherche refuge auprès d’Allah et cesse ( de répondre au diable et persévérer avec lui dans cela) » (Mouslim). Pour voir le hadith sur ce sujet, rapporté par Boukhârî et son explication, voir : ICI    

IV) Avoir le cœur présent, être attentif lors de l’action et réfléchir sur ce qu’elle renferme comme acte ou paroles. En effet, si l’individu est certain de ce qu’il accomplit, fait attention à ce qu’il dit et sait que ce qu’il a fait est ce qu’on attend de lui, cela l’empêchera de suivre le wawâs… Par exemple, pour ce qui est des ablutions, qu’il les fasse en utilisant un récipient contenant assez d’eau pour les faire et qu’il s’efforce de s’en contenter (cela l’aidera à ne pas refaire les ablutions)…Dans la prière, il s’efforce de suivre l’imam même s’il s’imagine qu’il n’a pas fait le dhikr requis et lorsque l’imam récite à voix haute, il l’écoute attentivement. De cette façon, il entraîne petit à petit son esprit à ces solutions. Sache que le remède pour ton esprit passe par la force de ta détermination et par la réforme de ton esprit car quels que soient les mots qui te sont adressés, tu n’en profiteras pas sauf si tu les acceptes, les appliques fermement et mets en pratique les directives qui te sont données. (Mais le remède ne se trouve pas) dans ce que le diable te dicte !   

Le cheikh de l’islam, ibn Taymiyya رحمه الله a dit: « Le wawâs arrive à tous ceux qui se dirigent vers Allah تعالى , durant le dhikr ou une autre action. Le serviteur doit être ferme, patienter, s’attacher à sa pratique du dhikr et de la prière et ne doit pas se lasser car en s’attachant à cela, la ruse du diable se détournera de lui; certes la ruse du diable est faible. Chaque fois que le serviteur veut se tourner vers Allah تعالى , avec son cœur, arrivent alors d’autres wawâs. Le diable est comme un voleur de grand chemin, chaque fois que l’adorateur veut aller vers Allah تعالى , le démon veut lui couper la route… »

Si une personne cède aux wawâs et n’y met pas fin, ces derniers vont l’amener à des choses qui peuvent avoir des conséquences funestes والعياذ بالله . Parmi les meilleurs moyens de mettre fin aux wawâs et de s’en débarrasser, c’est d’être convaincu que s’attacher aux wawâs consiste, en fait, à suivre le diable. 

…On sait tous que ce wawâs provient du diable et le maudit n’a d’autre but que de faire tomber le croyant dans le gouffre de l’égarement, de la confusion, de la vie pénible et de l’obscurité et de l’ennui de l’esprit jusqu’à le faire sortir de l’islam sans qu’il ne s’en rende compte. « Certes le diable est pour vous un ennemi. Prenez-le donc comme ennemi… ». Il ne fait aucun doute que celui qui se rappelle les voies (suivies par) les Messagers d’Allah عليهم السلام , et surtout par notre Prophète trouvera sa voie et sa loi faciles, claires, évidentes, ne contenant pas de difficulté. Allah عزوجل nous dit: « …et Il ne vous a imposé aucune gêne dans la religion… » (22 Le Pèlerinage: 78). Celui qui réfléchit à ce verset et y croit comme il se doit, la maladie du wawâs le quittera et il n’écoutera plus le diable à l’origine de son wawâs… 

L’imam An-Nawawî رحمه الله a rapporté de certains savants qu’il est bon pour celui qui est éprouvé par le wawâs dans les ablutions ou la prière qu’il dise «لا إله إلا الله » car lorsque le diable entend le dhikr, il s’éloigne et «لا إله إلا الله » est le sommet du dhikr.

V) Parmi les causes les plus importantes pour guérir du waswâs, il y a le fait de fréquenter les pieux, assister aux réunions de science et se méfier de la fréquentation de mauvaises personnes, de la solitude et du fait de s’isoler des gens…(5)

Les doutes répétés dans les ablutions et la prière proviennent du diable. Si le croyant, qui en souffre, cherche refuge auprès d’Allah contre le diable, son Seigneur le préservera de lui. Mais si le musulman cède au démon et suit ses ordres alors le diable le dominera et son wawâs occasionnel se transformera en une maladie funeste nommée « le wawâs compulsif  الوسواس القَهْرِي » (NdT : compulsif signifie qui est réalisé irrésistiblement même si le sujet désapprouve cette action). 

Le wawâs compulsif, comme le dit un spécialiste, est une maladie qui touche certaines personnes…elle consiste en des idées, des gestes, des pensées ou des penchants qui se répètent et sont détestables. Généralement, l’individu rejette ces choses, s’efforce d’y résister et il sait qu’elles sont fausses et n’ont aucun sens mais il y a une chose qui le pousse très fortement vers elles et la plupart du temps, il ne réussit pas à leur résister… Ce genre de wawâs affecte la personne dans ses actes d’adoration ainsi que dans les affaires de sa vie d’ici-bas. (1)

Le wawâs est un piège, le croyant averti doit le combattre et lui résister en mettant en pratique les enseignements d’Allah تعالى et de Son Prophète qui nous expliquent comment le faire disparaître. Par contre écouter et suivre le wawâs entraînera l’individu vers une vie de souffrance et de problèmes, qu’Allah تعالي nous en préserve.

Allah عز وجل dit: « Et dis: « Seigneur, je cherche Ta protection contre les incitations des diables. Et je cherche Ta protection contre leur présence auprès de moi » (23 Les croyants: 97-98). oummatoukoum: le 21 zoul al-qa’dah 1446 / 19-05-2025

(1) مصادر الوسواس : ICI

(2) Le hadith et son explication (en arabe) : ICI

(3)  توجيه لمن عنده وسواس في الوضوء : ICI 

(4) Le hadith et son explication (en arabe) : ICI

(5) كلمة هادية في أسباب الوساوس وسبل التغلب عليها : ICI

Comprendre et combattre le wawâs
Connaître le wawâs pour mieux le combattre